AM35 - Jeunesse et enfance

La communication sera basée sur notre thèse en cours de préparation intitulée « La littérature pour enfants dans la Tunisie indépendante ». En période de crise, l’École et les acteurs culturels affichent l’ambition de refonder la société, en inculquant des valeurs en phase avec le modèle sociétal promu à une époque donnée. L’un des supports investis dans ce but est le conte ou l’album, d’où notre intérêt pour cet objet. Notre intervention se concentrera sur la thématique de la tolérance.

Son traitement sera analysé en tentant de répondre aux questions suivantes :

Nous présenterons notre analyse des contes d’un point de vue littéraire, tout en empruntant des concepts des sciences humaines et sociales. Nous nous inscrivons donc dans une approche résolument transdisciplinaire, mais aussi multilingue, puisque les contes présentés seront en arabe et en français.

 La méthodologie de la recherche sera évidemment détaillée, en n’omettant pas d’évoquer les difficultés rencontrées sur le terrain, en termes d’accès aux données, aux archives et aux livres. Le contexte pandémique a pu également avoir un impact, du fait de la suspension des déplacements et la fermeture de certains lieux publics. 

 Le sujet de notre communication s’attachera à donner de la visibilité aux acteurs culturels du pays, à sa production intellectuelle et de se faire l’écho des réflexions quant à l’avenir, dans un contexte marqué par l’incertitude et les doutes. 

Le colloque « Bébé Sapiens : nœud de crises ? » (Cerisy, 2021), auquel a répondu le 4ème Congrès de la Société Tunisienne de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent (STPEA), a mis en évidence à quel point le bébé, qui demeure à bien des égards une terra incognita, était au centre de crises potentielles multiples. Crises développementales d’abord, dans la relation avec son entourage ; crises épistémiques ensuite, dans le lien entre savoirs théoriques et pratiques de soin ou d’élevage ; crises institutionnelles enfin, dans la complexité qu’implique sa prise en charge.

Interrogeant ces crises dans le contexte méditerranéen, cette communication propose un panorama critique des savoir sur la petite enfance, notamment à partir d’une étude de terrain comparative en cours en France et en Tunisie. Dans une perspective mêlant l’anthropologie, la psychologie, la sociologie et la psychanalyse,  nous abordons à la fois son accueil au sein de la famille et des institution (crèches, jardin d’enfant, PMI), les pratiques et les rites qui entourent sa venue au monde et sa croissance, ainsi que son développement psychique. Ce faisant, nous entendons souligner l’ampleur des transformations qui affectent aujourd’hui la parenté et les processus de subjectivation dans cette région. 

Le concept « pluridisciplinaire », ancré dans la musicologie moderne, nous a mené à penser à cette question : Une chanson folklorique peut-elle être perçue convenablement par des enfants non musiciens qui appartiennent au même environnement de cette chanson même s’ils ne comprennent pas sa matière musicale ?

Notre objectif est de comprendre si le fait musical analytique est rattaché en premier lieu à l’éducation académique musicale, ou s’il s’agit d’un fait fortement lié au phénomène d’acculturation. Nous avons mené une expérience sur 28 élèves non musiciens (d’une moyenne d’âge égale à 12 ans et qui sont d’origine rurale (Sbiba, Al Kasserine, Tunisie), nous leurs avons demandé de segmenter un extrait de la chanson « Al Beb Darik » en phrases mélodiques principales.

Les principaux résultats ont montré que le pourcentage de segmentations justes oscille entre 67,8 % et 100 % avec une moyenne de 91,1 % et que le pourcentage de réponses fausses oscille entre 0 et 17,9 % avec une moyenne de 10,21 %. 

Les segmentations des élèves correspondent aux données de l’analyse thématique et au schéma hiérarchique de notre chanson « Al Beb Darik ».  Leurs réactions sont dues à l’acquisition d’un matériel perceptif culturel. En effet, nous pouvons affirmer qu’il existe une ressemblance entre la musique modale tunisienne, la folklorique en particulier, et les signes de reconnaissances cognitives de ces enfants.  Plusieurs facteurs peuvent influencer le sens modal de l’enfant non musicien, tel que le goût musical et le processus de l’acculturation. Une même expérience avec d’autres données peut aboutir à des résultats complètement différents à ceux que nous avons obtenues : cela dépend de l’échantillon, de l’extrait musical et d’autres facteurs externes.

En Égypte, comme dans de nombreux autres pays du monde, les rêves d'un avenir meilleur prennent souvent la forme de projets (mashari') : des citoyens issus de la plupart des classes sociales lancent des projets de petites entreprises pour compléter leurs maigres revenus ; le gouvernement dirigé par l'armée investit matériellement et symboliquement dans des mégaprojets. Cet article anthropologique examine les projets futurs égyptiens à différentes échelles. Sur la base d'un travail ethnographique de terrain de longue haleine avec des porteurs de projets de la classe moyenne inférieure au Caire et d'analyses médiatiques des mégaprojets, il définit deux configurations spatiales qui distribuent les rêves de projets égyptiens de manière inégale. Premièrement, le désert vaste et vide, où l'avenir peut être projeté à partir de rien, mais uniquement pour les privilégiés qui y ont un accès exclusif. Deuxièmement, les espaces à l'intérieur des institutions publiques désaffectées (écoles, parcs, centres de jeunesse), qui sont l'un des rares sites restants pour lancer des projets à petite échelle dans une ville par ailleurs congestionnée. En réfléchissant à l'impact de ces deux contextes différents sur les futurs que les projets évoquent, l'article met en lumière un paradoxe particulier. Alors que le désert peut sembler être un terrain de jeu infini pour la création de futurs grandioses, les projets dans le désert tiennent rarement leurs promesses en raison de leur faible connectivité avec les environnements urbains déjà existants. Au sein des anciennes institutions étatiques, en revanche, les projets sont généralement moins spectaculaires et limités par l'inertie matérielle, juridique et financière. Pourtant, c'est précisément cette complexité qui rend les projets plus durables et les projets d'avenir plus restreints, mais aussi plus réalistes. 

Cet article explore le rôle de la littérature tunisienne pour enfants dans la promotion de l'autonomisation des femmes. On part du postulat que de nombreux livres édités par des maisons d'édition tunisiennes contiennent intrinsèquement des informations et des stéréotypes sexistes paralysants.

 En appliquant l'analyse du discours féministe et la théorie de l'autonomisation de Sadan sur un corpus de 20 livres de contes produits depuis le déclenchement de la pandémie, soit entre 2020 et 2022, cette étude examine la représentation des personnages féminins dans les livres de contes en supposant que la littérature jeunesse puisse montrer des manifestations d'autonomisation ou d'impuissance.

 Les principales conclusions de cette étude peuvent être formulées comme suit : Premièrement, la littérature tunisienne pour enfants présente beaucoup de préjugés sexistes et  ne promet pas l'autonomisation des femmes comme souhaité. Deuxièmement, nous validons également les affirmations précédentes selon lesquelles les discours sérieux se trouvent dans les médias de divertissement et les livres de contes pour enfants sont chargés d'idéologie. Troisièmement, l’étude formule un certain nombre de recommandations qui remettent en question le récit patriarcal dominant, font progresser l’autonomie féminine et favorisent l'estime de soi et le leadership chez les  jeunes femmes arabes.