A10 - Ethnographies en temps de crises : entre observation et adaptation méthodologique 2/2

Responsables:  Suzan Gibril et Fanny Arnulf, Université libre de Bruxelles, Belgique

Lorsque les chercheurs et chercheuses effectuent un travail de terrain dans des contextes coloniaux, ils et elles sont souvent confrontés à un large éventail de défis liés à l'accès limité aux sources de données, à l'absence d'interlocuteurs et aux soupçons des autorités coloniales. Ces obstacles sont variés et soulèvent des questions essentielles. Comment la recherche est-elle affectée et limitée par cet environnement politique ? Quels sont les défis pratiques de la recherche dans de tels contextes ? Quelles sont les questions méthodologiques et  politiques auxquelles les chercheurs sont confrontés ? Pour explorer ces questions, je présente les notions de  bricolage et de glanage comme un moyen de réfléchir de manière critique à mes propres expériences de recherche en Palestine sur la planification, le développement, l'expérience et les contestations des  infrastructures de dépossession. 

Dans cette communication, je me baserai sur mes recherches actuelles sur le gouvernement des corps  transsexuels en Iran pour revenir sur les enjeux d’une enquête ethnographique offsite. D’une part, j'évoquerai  comment le numérique et les pratiques afférentes de collecte, d’analyse et de stockage ont profondément  remanié les possibles de l’enquête et de l’écriture ethnographiques. D’autre part, j’exposerai les modalités  pratiques d’une enquête à distance mobilisant des sites d’enquête en dehors du terrain iranien. Je reviendrai  enfin sur l’articulation de ces différents terrains d’enquête. Pratiquée à distance, sur les réseaux sociaux, au  téléphone, s’appuyant sur des corpus et des archives numérisés, l’ethnographie recouvre en effet des formes  et des méthodes qui questionnent les conceptions classiques du travail de terrain – tandis que s’élaborent de  nouvelles manières d’en rendre compte.

L’enseignement supérieur au Liban a longtemps joui d’une excellente réputation, mais depuis la guerre civile  (1975-1989), la renommée des universités libanaises est en baisse progressive, en raison d’une crise économique  endémique, d’une instabilité sécuritaire, de l’immobilisme politique et, et bien sûr la pandémie de la COVID 19. 

Mon papier porte sur les menaces et les défis de l’université dans un Liban en faillite. Il s’agit d’examiner de quelle  manière l’enseignement supérieur s’adapte à des contextes contraignants qui le menacent ; comment enseigner et  produire un savoir libre et critique, continuer à faire de la recherche en temps de crises et faire face aux pressions  économiques et sanitaires ? Quelles sont les actions menées par les différentes universités pour contourner les  difficultés ? Pour y répondre, nous reviendrons dans un premier temps sur l’histoire de l’enseignement libanais et son héritage, dans un deuxième temps nous parlerons de la situation critique actuelle et de son impact sur les universités, nous terminerons par les conséquences et les stratégies d’adaptation mises en place pour éviter l’effondrement.