Responsable: >Fârès Gillon

A67 - Enjeux de la ritualité en Islam : le cas des ablutions

Date : 2022-09-23 | 14:00:00-16:00:00

Évènement : Congrès INSANIYYAT

Programme détaillé : cliquer ci-contre
Catégorie :
A
Lieu :
ISAMM
Salle :
C3
Responsable : Fârès Gillon
Modérateur·trice :
Discutant·e :
Les intervenant·e·s :
Amharar Ilyass Aix-Marseille Université
Salah Clément Sorbonne Université/Université de Lausanne
Gillon Fârès The Institute of Ismaili Studies
Vandamme Gregory UCLouvain, Belgique

A67 - Enjeux de la ritualité en Islam : le cas des ablutions FR

Salle: C3
Responsable: Fârès Gillon, The Institute of Ismaili Studies, Londres, Angleterre

  • Ilyass Amharar, IREMAM, Aix-Marseille Université (France), Les ablutions entre théorie légale et langue arabe : débat autour de Coran V, 6

  • Clément Salah, Sorbonne Université / Université de Lausanne, La divergence juridique autour des ablutions chez les premiers disciples de Mālik b. Anas (m. 179/795) : une divergence méthodologique ?

  • Fârès Gillon, The Institute of Ismaili Studies, Londres, (Angleterre), L’interprétation personnalisée des ablutions en contexte nuṣayrite et ismaélien

  • Gregory Vandamme, Université Catholique de Louvain, (Belgique), Une lecture symbolique et littéraliste des règles d’ablution : la purification selon les Futūḥāt makkiyya d’Ibn ʿArabī

A67 - Enjeux de la ritualité en Islam : le cas des ablutions FR

La diversité doctrinale et rituelle de l’islam formerait autant de courants séparés et sans rapport les uns aux autres s’il n’existait un certain nombre d’éléments consensuellement compris comme marqueurs d’islamité. Dès lors, c’est en investissant ces éléments communs que chaque courant cherche à se démarquer, en proposant sa propre lecture de ce qui est communément admis par les musulmans. 

C’est dans cette perspective que le présent atelier se propose d’étudier le cas des ablutions rituelles (wuḍūʾ) et quelques-uns des concepts s’y rapportant (ṭahāra, ghusl, masḥ, …), l’objectif étant d’illustrer la façon dont divers débats et discussions se jouent dans ce topos de l’islamité. En effet, les ablutions rituelles, en tant qu’elles sont liées à la prière rituelle (ṣalāt) relèvent de ce qu’on peut considérer comme l’un des plus petits dénominateurs communs de l’islam – les musulmans se définissant a minima comme ahl al-qibla. C’est dire que proposer sa lecture et/ou son interprétation de tel ou tel aspect des ablutions est un enjeu majeur pour tout courant islamique. Au cours de l’atelier seront donc examinées des sources de différents courants (sunnisme, chiismes, soufisme) et disciplines (fiqh, exégèse coranique, taʾwīl symbolique) islamiques sur la question des ablutions. Au-delà de la seule illustration de la diversité des approches d’un même sujet, nous soulèverons quelques questions liées à la ritualité en islam : ainsi de son interprétation pratique, de sa signification doctrinale ou symbolique, ou encore du problème sulfureux de l’antinomisme. 

Responsable: Fârès Gillon, The Institute of Ismaili Studies, Londres, Angleterre

  • Ilyass Amharar, IREMAM, Aix-Marseille Université (France), Les ablutions entre théorie légale et langue arabe : débat autour de Coran V, 6
Condition de validité des prières canoniques, les ablutions ont été partiellement décrites en Coran V, 6. Si le reste de leurs modalités y sont passées sous silence (par ex., l’obligation ou non de déclarer son intention (niyya), de respecter l’ordre cité dans le Coran, etc.), celles-ci font l’objet de plusieurs débats chez les théoriciens du droit. Nous nous intéresserons dans cette intervention à la controverse sur la façon d’essuyer la tête (masḥ al-raʾs), signalée dans le verset par bi-ruʾūsikum : est-il question d’essuyer la totalité de la tête ? Une majorité ? Une minorité ? Nous verrons que ce débat s’est articulé autour d’une question linguistique portant sur la signification de la particule bi- dans ledit passage, ce qui nous permettra d’apprécier la relation complexe entre langue et théorie légale : laquelle des deux a influencé l’autre ?  Nous tenterons de retracer les contours de ce débat à partir de sa restitution dans les Nukat al-Maḥṣūl du Qāḍī Abū Bakr Ibn al-ʿArabī (m. 543/1148).

  • Clément Salah, Sorbonne Université / Université de Lausanne, La divergence juridique autour des ablutions chez les premiers disciples de Mālik b. Anas (m. 179/795) : une divergence méthodologique ?
Dans le courant du IIIe/IXe siècle est entreprise, sous la forme d’ouvrage, la compilation du ra’y des disciples de Mālik b. Anas dans un ensemble de livres appelés à devenir les « livres matrices » de la doctrine malikite (ummahāt al-kutub). Dans chacun de ces livres, les voies de transmission (riwāyāt) des enseignements de Mālik s’appuient sur des opinions attribuées au maître qui sont parfois différentes ou absentes des autres recensions, voire contradictoires. La présente communication se propose de replacer les avis divergents liés aux ablutions (masḥ al-raʾs, masḥ ‘alā al-ḫuffayn, mass al-faraǧ) dans le contexte juridique de leur formulation, à savoir l’opposition entre ahl al-ra’y et ahl al-ḥadīṯ. En reconstruisant les méthodologies utilisées par ces savants dans le cadre de leurs enquêtes juridiques, nous nous proposons de reconsidérer la place de l’autorité scripturaire (ḥadīṯ) et des traditions locales au sein de cette doctrine en formation, longtemps considérée comme un droit fondé essentiellement sur le ra’y.

  • Fârès Gillon, The Institute of Ismaili Studies, Londres, (Angleterre), L’interprétation personnalisée des ablutions en contexte nuṣayrite et ismaélien
La pratique du « commentaire coranique personnalisé » (Amir-Moezzi) dans la tradition exégétique chiite consiste à interpréter certains versets coraniques comme des allusions aux Imâms, à leurs compagnons ou à leurs adversaires. Cette interprétation ésotérique (taʾwīl) personnalisée fut étendue par certains courants chiites, particulièrement ceux des ghulāt (« exagérateurs »), aux prescriptions rituelles de l’islam, ouvrant ainsi la voie à l’antinomisme. Au-delà de cette question, l’interprétation personnalisée des rites islamiques fut non seulement un moyen d’affirmer l’identité et le « panthéon » chiites, par opposition aux autres courants de l’islam, mais elle fut aussi, et surtout, un lieu où se jouaient l’affirmation de légitimités spirituelles et politiques rivales au sein même du chiisme. À partir de sources des Xe-XIe s., nous illustrerons ceci à travers l’exemple du taʾwīl personnalisé des ablutions dans deux traditions héritières, à des titres distincts, du ghuluww, le nuṣayrisme et l’ismaélisme.

  • Gregory Vandamme, Université Catholique de Louvain, (Belgique), Une lecture symbolique et littéraliste des règles d’ablution : la purification selon les Futūḥāt makkiyya d’Ibn ʿArabī
L’herméneutique d’Ibn ʿArabī (m. 638/1240) se fonde sur un rapport paradoxal à la révélation coranique et à la tradition prophétique. En effet, c’est par une attention minutieuse à la lettre de la Loi elle-même que se révèle selon lui son esprit. De la même façon, c’est par une observation rigoureuse des préceptes religieux que s'atteignent les réalités qui transcendent la forme et les doctrines liées aux rites. Cette approche paradoxale de la norme apparaît de manière évidente dans les longs chapitres consacrés aux règles des pratiques rituelles qui se trouvent dans la première section de son encyclopédie spirituelle : al-Futūḥāt al-makkiyya. Ibn ʿArabī y discute à la fois des questions d’orthopraxie, en abordant les divergences juridiques concernant les obligations religieuses, et de la signification symbolique et spirituelle des rites jusque dans leurs moindres détails. Dans cette présentation, nous analyserons comment Ibn ʿArabī articule la norme juridique avec sa dimension symbolique dans le chapitre consacré aux « secrets de la purification » (asrār al-ṭahāra).

The doctrinal and ritual diversity of Islam would form so many separate and unrelated trends if there were not a certain number of elements consensually understood as markers of Islamity. From then on, it is by investing these common elements that each current seeks to distinguish itself, by proposing its own reading of what is commonly accepted by Muslims.

It is in this perspective that the present workshop proposes to study the case of ritual ablutions (wuḍūʾ) and some of the concepts related to it (ṭahāra, ghusl, masḥ, ...), the aim being to illustrate the way in which various debates and discussions are played out in this topos of Islamity. Indeed, ritual ablutions, insofar as they are linked to ritual prayer (ṣalāt) fall under what can be considered one of the lowest common denominators of Islam - since Muslims define themselves a minima as ahl al-qibla. This means that proposing a reading and/or interpretation of this or that aspect of ablutions is a major issue for any Islamic current. In the course of the workshop, sources from different Islamic currents (Sunnism, Shi‘ism, Sufism) and disciplines (fiqh, Qur'anic exegesis, symbolic taʾwīl) on the issue of ablutions will therefore be examined. Beyond merely illustrating the diversity of approaches of the same subject, we will raise some of the questions related to rituality in Islam, namely its practical interpretation, its doctrinal or symbolic meaning, or the sulphurous problem of antinomianism.

Responsable: Fârès Gillon, The Institute of Ismaili Studies, Londres, Angleterre

  • Ilyass Amharar, IREMAM, Aix-Marseille Université (France), Les ablutions entre théorie légale et langue arabe : débat autour de Coran V, 6
The ablutions between legal theory and Arabic language: discussion around Qur’an 5:6

As a condition of the validity of canonical prayers, ablutions have been partially described in Qur’an 5:6. While the rest of their modalities are not mentioned there (e.g., the obligation to state one’s intention (niyya), or to follow the order cited in the Qur’an, etc.), they are the subject of several debates among legal theorists. In this talk, we will focus on the controversy over how to wipe the head (masḥ al-raʾs), signaled in the verse by bi-ruʾūsikum: is it a question of wiping the whole head? A majority? A minority? We will see that this debate hinged on a linguistic question about the meaning of the particle bi- in the said passage, which will allow us to appreciate the complex relationship between language and legal theory: which one influenced the other? We will attempt to trace the contours of this debate from its rendition in the Nukat al-Maḥṣūl of Qāḍī Abū Bakr Ibn al-ʿArabī (d. 543/1148).

  • Clément Salah, Sorbonne Université / Université de Lausanne, La divergence juridique autour des ablutions chez les premiers disciples de Mālik b. Anas (m. 179/795) : une divergence méthodologique ?
The legal divergence around ablutions among the first disciples of Mālik b. Anas (d. 179/795): a methodological divergence?

In the course of the 3rd/9th century, the ra’y of the disciples of Mālik b. Anas was compiled in a set of books called to become the “matrix books” of the Māliki doctrine (ummahāt al-kutub). In each of these books, the channels of transmission (riwāyāt) of Mālik’s teachings are based on opinions attributed to the master which are sometimes different or absent from the other transmitters, even contradictory. This communication proposes to resituate the divergent opinions related to ablutions (masḥ al-raʾs, masḥ ‘alā al-ḫuffayn, mass al-faraǧ) in the legal context of their formulation, namely the opposition between ahl al-ra’y and ahl al-ḥadīṯ. By reconstructing the methodologies used by these scholars in the framework of their legal investigations, we propose to reconsider the place of scriptural authority (ḥadīṯ) and local traditions within this doctrine in formation, long considered as a law based essentially on the ra’y.

  • Fârès Gillon, The Institute of Ismaili Studies, Londres, (Angleterre), L’interprétation personnalisée des ablutions en contexte nuṣayrite et ismaélien
The personalised interpretation of ablutions in the Nuṣayri and Ismaili contexts

The practice of the ‘personalised Qur’anic commentary’ (Amir-Moezzi) in the Shi‘i exegetical tradition consists of interpreting certain Qureanic verses as allusions to the Imams, their companions or their adversaries. This personalised esoteric interpretation (taʾwīl) was extended by some Shi'a currents, particularly those of the ghulāt (‘exaggerators’), to the ritual prescriptions of Islam, thus paving the way for antinomianism. Beyond this issue, the personalised interpretation of Islamic rites was not only a means of asserting the Shi‘i identity and ‘pantheon’, as opposed to the other currents of Islam, but it was also, and above all, a place where rival spiritual and political legitimacies within Shi‘ism itself were played out. We will illustrate this through the example of the personalised taʾwīl of ablutions in two traditions that are heirs to ghuluww, although differently: Nuṣayrism and Ismailism. 

  • Gregory Vandamme, Université Catholique de Louvain, (Belgique), Une lecture symbolique et littéraliste des règles d’ablution : la purification selon les Futūḥāt makkiyya d’Ibn ʿArabī

A symbolic and literalist reading of the rules of ablution: Purification according to the Futūḥāt makkiyya of Ibn ʿArabī

The hermeneutics of Ibn ʿArabī (d. 638/1240) are based on a paradoxical relationship to the Qur’anic revelation and the prophetic tradition. According to him, it is through careful attention to the letter of the Law itself that its spirit is revealed. In the same way, it is through a rigorous observance of religious precepts that the realities that transcend the form and the doctrines linked to the rites are reached. This paradoxical approach to the norm is evident in the lengthy chapters devoted to the rules of ritual practices found in the first section of his spiritual encyclopaedia: al-Futūḥāt al-makkiyya. Ibn ʿArabī discusses there both issues of orthopraxy, addressing legal discrepancies regarding religious obligations, and the symbolic and spiritual significance of rites down to the smallest detail. In this presentation, we will analyze how Ibn ʿArabī articulates the legal norm with its symbolic dimension in the chapter devoted to the “secrets of purification” (asrār al-ṭahāra).

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