Responsable: >Morgann Barbara Pernot & Mohammed Sharqawi

A60 - Ce que la guerre fait au terrain : l’exemple du conflit yéménite

Date : 2022-09-23 | 16:15:00-18:15:00

Évènement : Congrès INSANIYYAT

Programme détaillé : cliquer ci-contre
Catégorie :
A
Lieu :
ESCT
Salle :
D18
Responsable : Morgann Barbara Pernot & Mohammed Sharqawi
Modérateur·trice :
Discutant·e :
Les intervenant·e·s :
Naji Mustafa Université de Rouen
Lauret Alexandre Paris 8
Sharqawi Mohammed EHESS
Pernot Morgann Barbara EHESS
Al Majali Solenn Aix-Marseille Université

A60 - Ce que la guerre fait au terrain : l’exemple du conflit yéménite FR

Salle: D18
Responsables: Morgann Barbara Pernot, EHESS, IRIS, France, Mohammed Sharqawi, FMSH, France

  • Alexandre Lauret, Université Paris VIII Vincennes-Saint-Denis, (France),  LADYSS, La notion de rivage au prisme de l’exil : le cas des réfugiés yéménites d’Obock.
  • Solenn Al Majali, Aix-Marseille Université, Telemme (France) – Ifpo Ammanprojet Ithaca du CNRS "Interconnected Histories and Archives for Migrants", Réfugiés africains et yéménites métis à Hay al-Masarwah : entre frontières ethniques et sociabilités mixtes    
  • Morgann Barbara Pernot, EHESS, IRIS, (France), (Éthiopie), Recompositions de l’identité nationale en migration : Chez les Yéménites à Djibouti, une identité yéménite cristallisée et figée autour des femmes.   
  • Mohammed Sharqawi, Fondation de la Maison des Sciences de l’Homme, (France), La Yemeni Community Association et la politisation des Yéménites d’Angleterre
  • Mustafa Naji, Université de Rouen, DySoLab, (France), L'impact de l'exil sur les perceptions politiques et intellectuelles des intellectuels yéménites en Turquie

A60 - Ce que la guerre fait au terrain : l’exemple du conflit yéménite FR

De nombreux travaux en sciences sociales prennent pour terrain et objet de recherche des régions en conflit armé. Dans le monde arabe, depuis le début des mouvements révolutionnaires de 2011, la violence des conflits change les problématiques de recherche et limite, voire suspend l’accès à certains terrains.

Avec cet atelier, nous proposons de nous intéresser à la façon dont la guerre au Yémen configure ou reconfigure l’enquête, dans son élaboration théorique et sa réalisation pratique. D’une part, nous questionnons l’état des recherches en sciences sociales sur les migrations yéménites, historiquement et depuis 2015, ainsi que les transformations qu’elles engendrent dans les relations des Yéménites à leur pays d’origine, qui se manifestent dans la construction des imaginaires, des identités et des altérités. D’autre part, nous échangerons autour des enjeux méthodologiques que suscite l’inaccessibilité des terrains yéménites, poussant les chercheur.euse.s à effectuer un « terrain sans terrain », au moyen de bricolages et innovations méthodologiques, ou à opter pour l’étude de communautés yéménites en exil. 

Les jeunes chercheur.euse.s participant à l’atelier souhaitent ainsi engager un dialogue sur ces thématiques avec une approche interdisciplinaire et comparée, s’appuyant sur leurs différents ancrages disciplinaires (géographie, sociologie, anthropologie) et leurs expériences ethnographiques sur des terrains variés.

Responsables: Morgann Barbara Pernot, EHESS, IRIS, France, Mohammed Sharqawi, FMSH, France

  • Alexandre Lauret, Université Paris VIII Vincennes-Saint-Denis, (France),  LADYSS, La notion de rivage au prisme de l’exil : le cas des réfugiés yéménites d’Obock.
Cette contribution analyse la notion et la perception du « rivage » dans le contexte des réfugiés yéménites installés à Djibouti et plus précisément, au sein du camp de Markazi d’Obock. Cette notion de rivage s’avère double. Elle se réfère d’abord à une donnée de la géographie physique, celle de l’espace maritime et de la séparation des terres entre Djibouti et le Yémen. Traverser cet espace traduit donc un changement de conditions : de la guerre à la paix, du citoyen au réfugié, enfin d’une territorialité familière à l’inconnu de l’exil. La notion de rivage se réfère ensuite à une construction nostalgique du pays perdu en guerre. Le rivage devient alors interdit, impossible à atteindre. Cette inaccessibilité n’est pas tant une question de distance ou de sécurité mais bien mentale construite autour de la vision d’un pays disparu et dont il ne reste que les souvenirs. Or ce rivage a un double effet performatif sur les réfugiés, celui d’idéaliser une société et dévaloriser la nouvelle.

  • Solenn Al Majali, Aix-Marseille Université, Telemme (France) – Ifpo Ammanprojet Ithaca du CNRS "Interconnected Histories and Archives for Migrants", Réfugiés africains et yéménites métis à Hay al-Masarwah : entre frontières ethniques et sociabilités mixtes    
Cette communication se propose de se pencher sur le cas des réfugiés yéménites en Jordanie, à Amman. Il s’agira de rendre compte d’un nouvel exil en Jordanie, celui des réfugiés yéménites, étiquetés par les acteurs humanitaires en Jordanie comme réfugiés « non-syriens ». Découle de cette catégorisation, des droits humanitaires et un accès aux services publics jordaniens fortement restreints. La contribution repose sur une enquête de terrain réalisée depuis 2019 à Amman et se base sur une cinquantaine d’entretiens semi-directifs, de nombreuses observations ainsi que de multiples entretiens informels.  Nous nous intéresserons à savoir comment ce statut particulier de ces réfugiés non-reconnus empiète sur leur vie quotidienne, sur leurs modes d’habiter et leurs appropriations spatiales en Jordanie. Une deuxième partie traitera également des différentes configurations sociales observables au sein des communautés yéménites en Jordanie. Différentes frontières sociales, raciales et politiques font profiler en effet des groupes de réfugiés yéménites qui mobilisent et investissent différemment leur exil. 

  • Morgann Barbara Pernot, EHESS, IRIS, (France), (Éthiopie), Recompositions de l’identité nationale en migration : Chez les Yéménites à Djibouti, une identité yéménite cristallisée et figée autour des femmes.   
La guerre au Yémen a bouleversé la nature des migrations vers Djibouti. Historiquement commerçantes, masculines et provisoires, elles s’hybrident, devenant aussi des migrations forcées et familiales qui tendent à se prolonger. Les ruptures engendrées par la normalisation de la migration des femmes se jouent tout d’abord sur le plan spatial, avec l’éloignement du territoire d’origine et des générations précédentes qui y sont restées. Elles se jouent également sur le plan temporel, puisque la distension des liens intergénérationnels menace la continuité générationnelle et, par là même, la transmission de l’identité. Pour s’en prémunir, les femmes rencontrées mettent en œuvre un dispositif de renforcement des normes de genre, à l’aune desquelles on mesure l’honneur, garant d’une identité. La guerre et la migration qu’elle provoque semblent alors contribuer à une recomposition de l’identité yéménite, désormais déterritorialisée et cristallisée. Fondée sur une ethnographie de six mois au sein de la communauté yéménite commerçante à Djibouti et le recueil de récits de vie de femmes, cette communication propose ainsi de confronter le cas yéménite aux travaux sur les implications identitaires de la guerre et de la migration, notamment au prisme du genre.

  • Mohammed Sharqawi, Fondation de la Maison des Sciences de l’Homme, (France), La Yemeni Community Association et la politisation des Yéménites d’Angleterre
La création de la Yemeni Community Association (YCA) permet aux Yéménites d’Angleterre de faire face au manque de reconnaissance de leur community. Mais cette association est aussi traversée par le champ politique yéménite dont l’actualité est en permanence brûlante depuis le début de la seconde moitié du 20e siècle. Cela redéfinit par conséquent le discours des dirigeants de l’association ainsi que le discours sur l’expérience migratoire, syndicale et associative au sein de cette association. Pour illustrer notre propos, nous nous intéresserons à trois temps marquants de cette association : le temps des syndicats de travailleurs Sudistes et Nordistes pendant les années 1960-70 permettant de participer à la lutte pour la libération du Yémen du Sud ; celui de l’union des deux Yémen en 1990 accompagné de l’union entre ces syndicats pour créer l’YCA ; et enfin celui de la révolution yéménite de 2011 débouchant sur la remise en cause de l’identité yéménite.

  • Mustafa Naji, Université de Rouen, DySoLab, (France), L'impact de l'exil sur les perceptions politiques et intellectuelles des intellectuels yéménites en Turquie
La guerre au Yémen a conduit à l'exil beaucoup de Yéménites à la recherche d'un refuge contre l'oppression. Une partie d’entre eux a choisi la Turquie (Istanbul) pour des raisons de facilité d’accès et/ ou pour des raisons politiques et idéologiques. En effet, un certain nombre d’entre eux appartient à l'islam politique, travaille dans le domaine intellectuel et mène des activités politiques. Cette recherche porte sur la socialisation et l'interaction des individus avec des facteurs d’influences différents dans un environnement caractérisé par la volatilité politique et idéologique et par la domination religieuse. Dans le cadre d’une étude des biographies à travers des entretiens et des observations commencés à la fin de l'année 2021, nous cherchons à clarifier l'impact de l'exil comme environnement externe d'interaction dans les perceptions politiques et intellectuelles du segment des personnes rencontrées.

What war does to the field: the example of the Yemeni conflict
 
Many works in the social sciences take as their field and research object regions in armed conflict. In the Arab world, since the beginning of the revolutionary movements of 2011, violence of conflicts has changed research issues and limited or even suspended access to certain fields.
With this workshop, we suggest to focus on the way in which the war in Yemen programs or reprograms the investigation, in its theoretical elaboration and its practical achievement. On the one hand, we question the state of social sciences research on Yemeni migrations, historically and since 2015, as well as the transformations they engender in the relations of Yemenis to their country of origin, which are manifested in the construction of imaginations, identities and alterities. On the other hand, we will discuss the methodological issues raised by the inaccessibility of the Yemeni fields, pushing researchers to carry out a "fieldwork without field", by means of bricolage and methodological innovations, or to opt for the study of Yemeni communities in exile.
The young researchers participating in this workshop thus wish to engage in a dialogue on these themes with an interdisciplinary and comparative approach, drawing on their different disciplines (geography, sociology, anthropology) and their ethnographic experiences in various fields.

Responsables: Morgann Barbara Pernot, EHESS, IRIS, France, Mohammed Sharqawi, FMSH, France

  • Alexandre Lauret, Université Paris VIII Vincennes-Saint-Denis, (France),  LADYSS, La notion de rivage au prisme de l’exil : le cas des réfugiés yéménites d’Obock.
The notion of the shore through the prism of exile: the case of the Yemeni refugees of Obock.
 
This contribution analyzes the concept and the perception of the “shore” in the context of the Yemeni refugees settled in Djibouti and specifically inside of the Markazi camp of Obock. This notion of shore proves to hold a double meaning. Firstly, the shore refers to physical geography data concerning the maritime space and the Detroit’s water between Djibouti and Yemen. To travel through this maritime space signifies changing conditions from war to peace, from citizenship to the refugee, finally from a family territoriality to the unknown of exile. Then, the notion of shore refers to a nostalgic construction of the land lost because of war. So, the shore becomes forbidden, impossible to reach. This impossibility does not stem from distance or security but from the mental construction of a lost land, of which only memories remain. However, this shore has a double performative effect on the refugees: idealizing the past society and devaluing the new society.

  • Solenn Al Majali, Aix-Marseille Université, Telemme (France) – Ifpo Ammanprojet Ithaca du CNRS "Interconnected Histories and Archives for Migrants", Réfugiés africains et yéménites métis à Hay al-Masarwah : entre frontières ethniques et sociabilités mixtes    
Yemeni refugees in Jordan: in search of a status and new mobilities

This paper will examine the case of Yemeni refugees in Jordan, in Amman. The aim is to look at the new exile in Jordan of Yemeni refugees, labeled by humanitarian actors in Jordan as "non-Syrian" refugees. This categorization results in restricted humanitarian rights and access to Jordanian public services. The contribution is based on a field survey conducted since 2019 in Amman and is constituted on about fifty semi-structured interviews, numerous observations as well as multiple informal interviews. We will try to see how this particular legal status of these non-recognized refugees affects their daily life, their modes of living and their spatial appropriations in Jordan. A second part will also deal with the different social configurations that can be observed within Yemeni communities in Jordan. Different social, racial and political boundaries result in different groups of Yemeni refugees who mobilize and invest their exile differently.

  • Morgann Barbara Pernot, EHESS, IRIS, (France), (Éthiopie), Recompositions de l’identité nationale en migration : Chez les Yéménites à Djibouti, une identité yéménite cristallisée et figée autour des femmes.   
Recompositions of national identity in migration: Among Yemenis in Djibouti, a Yemeni identity crystallised and fixed around women.  

The war in Yemen has changed the pattern of migration to Djibouti from the historical, male, temporary trade migrations to forced and prolonged family migrations.The ruptures caused by the normalization of women's migration are first of all spatial, with the distance from the territory of origin and the previous generations who stayed there. They are also temporal, since the weakening of intergenerational links threatens generational continuity and therefore the transmission of identity. To counteract these ruptures, some women implement a device to reinforce gender norms, on the basis of which honor, the guarantor of Yemeni identity, is measured. That is how war and migrations seem to contribute to a recomposition of the Yemeni identity, which is now deterritorialised and crystallised.

This study is based on a six-month ethnography within the Yemeni merchants’ community in Djibouti and the collection of women's life stories. It aims to confront the Yemeni case with work on the identity implications of war and migration, particularly through a gender lens. 

  • Mohammed Sharqawi, Fondation de la Maison des Sciences de l’Homme, (France), La Yemeni Community Association et la politisation des Yéménites d’Angleterre
The Yemeni Community Association and the politicization of Yemenis in England

The creation of the Yemeni Community Association (YCA) allows Yemenis in England to face the lack of recognition of their community. But this association is also crossed by the Yemeni political field which topicality has not ceased to burn since the beginning of the second half of the 20th century. This therefore redefines the leaders' discourse/ the discourse of the leader of the organization as well as the discourse on the migratory, union and associative experience within this association. To illustrate our point, we will focus on three significant times of this association: the time of the trade unions of Southern and Northern workers during the years 1960-70 allowing them to participate in the struggle for the liberation of South Yemen; that of the union of the two Yemens in 1990 accompanied by the union between these unions to create the YCA; that of the Yemeni revolution of 2011 leading to the questioning of the Yemeni identity.

  • Mustafa Naji, Université de Rouen, DySoLab, (France), L'impact de l'exil sur les perceptions politiques et intellectuelles des intellectuels yéménites en Turquie
The impact of exile on the political and intellectual perceptions of Yemeni intellectuals in Turkey
 
The war in Yemen has driven many Yemenis into exile in search of refuge from oppression. Some of them chose Turkey (Istanbul) because of the ease of getting there and/or for political and ideological reasons: indeed, a certain number belong to political Islam, work in the intellectual field and engage in political activities. This research focuses on the socialization and interaction of individuals with different influencing factors in an environment characterized by political and ideological volatility and religious domination. We seek, by conducting a study of biographies through interviews and observations begun at the end of 2021, to clarify the impact of exile as an external environment of interaction in the political and intellectual perceptions of the segment of people met.


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